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Bilan économique des entreprises les plus imposantes du capitalisme.
La pandémie mondiale de COVID-19 a provoqué de nombreuses fluctuations sur les marchés boursiers. L’ensemble des marchés mondiaux s’est effondré début mars 2020, anticipant les conséquences des confinements à venir, avant de remonter progressivement jusqu’à atteindre, pour certaines actions, des sommets inégalés au cours de l’automne 2020. Alors qu’on pouvait penser au printemps que la crise pandémique allait être le déclenchement d’une crise économique plus profonde, le début de cette dernière semble pour le moment reporté dans le temps. Aujourd’hui, les capitalisations boursières des entreprises surnommées les GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft) ont dépassé les 7 400 milliards cumulés début décembre 2020 (pour comparaison le PIB annuel de la France était de 2 427 Mds en 2019, la capitalisation boursière totale de l’ensemble des entreprises du CAC40 est quant à elle « seulement » de 1 780 milliards).
Le pouvoir et la valeur de ces entreprises deviennent dès lors difficilement imaginables, mais il est nécessaire de rentrer dans le détail pour comprendre ce que ça cache. Est-ce seulement le gonflement de nouvelles bulles spéculatives qui compensent et repoussent la crise économique ou bien ces dernières révèlent-elles une adaptation et une évolution particulière du fonctionnement du système capitaliste ? À travers une série d’articles, nous avons décidé d’approfondir le sujet pour tenter de comprendre les racines et les implications de ces phénomènes.
Si nos autres articles de la série Entre pandémie et taux de profit peuvent aisément être abordés de manière indépendante, dans un souci de cohérence, nous vous conseillons vivement de parcourir Analyse marxiste de la capitalisation boursière avant de débuter la lecture de celui-ci.
Pour comprendre le fonctionnement économique des GAFAM et avec eux celui d’une partie importante des entreprises actuellement, il est nécessaire de se plonger pleinement dans les mécanismes financiers qui soutiennent leurs activités. Pour cela, il est nécessaire d’utiliser et d’approfondir certains concepts d’économie politique. Si certains termes peuvent échauder les non spécialistes, pour que notre analyse demeure accessible et sans ambiguïté nous choisissons d’expliciter chacune des notions économiques que nous viendrons à utiliser.
Le taux de profit des GAFAM
Comme nous l’avons détaillé dans notre article précédent, la capitalisation boursière de nombreuses entreprises, dont celle des GAFAM, a littéralement explosé sur ces dernières années. L’observation de ces données devient particulièrement intéressante lorsqu’on commence à les comparer au taux de profit annuel dégagé par ces entreprises. Ce taux correspond au pourcentage de profit que récupère une entreprise en fonction de la valeur du capital engagé. C’est un rapport exprimé en pourcentage entre la plus-value générée par l’entreprise et l’ensemble du capital avancé pour permettre la production. Ainsi, ce taux de profit détermine la rentabilité d’une entreprise. Ce qui justifie ensuite d’y investir plus de capital. Par exemple, une entreprise investit 80 millions d’euros dans ses machines, ses locaux et ses matières premières (son capital constant), 10 millions dans le paiement de la force de travail (son capital variable) et 100 millions de capitalisation boursière (capital fictif)[1]. Elle parvient, à la fin de l’exercice, à dégager un profit de 20 millions. Dans ce cas, son taux de profit est de 10%.
Pour calculer ce taux de profit, nous choisissons de prendre en compte la capitalisation boursière comme partie intégrante du capital avancé. Même si ce capital ne permet pas d’être directement mobilisé pour la production, il joue un rôle déterminant dans l’accumulation du capital productif. Comme nous l’avons détaillé dans l’article Analyse marxiste de la capitalisation boursière, ce capital fictif permet à l’entreprise d’investir dans sa production au moyen de recapitalisations boursières, par un recours facilité au crédit ou en avalant d’autres sociétés dans le cadre de fusions-acquisitions par échange d’actions. Dès lors, il nous semble qu’il serait plus que périlleux aujourd’hui de considérer le poids du capital fictif comme négligeable dans le calcul du taux de profit.
Analysons l’évolution du taux de profit des GAFAM depuis la crise de 2008 :
On constate immédiatement que les évolutions du taux de profit des entreprises doivent se lire sous forme de tendances. C’est à dire qu’elles ne sont pas linéaires et les que les dynamiques qui s’en dégagent doivent se lire sur l’ensemble de la période analysé. Dans ce cas là, on constate que le taux de profit de toutes les entreprises des GAFAM n’évoluent pas de la même manière :
Comme pour ce qui est de l’évolution de la capitalisation boursière (cf. Analyse marxiste de la capitalisation boursière) on constate que la dynamique d’entreprises plus anciennes comme Apple et Microsoft se trouve légèrement différente des trois autres. Depuis 2008 et malgré l’importantes fluctuations annuelles, le taux de profit est tendanciellement à la baisse pour ces deux géants du numérique.
À l’opposé, si le taux de profit a eu tendance à chuter après la crise de 2008 pour Amazon et Facebook (qui n’était alors pas encore introduit en bourse), il est reparti à la hausse dès 2013-2014. Le taux de profit de Google à lui plutôt tendance à demeurer stable. Il est possible d’expliquer ce maintient voir cette hausse notamment par le développement productif de ces entreprises qui ont largement investi, à la fois dans les machines, mais surtout dans la force de travail. En effet, on constate que les effectifs de ces entreprises ont fortement augmentés à partir de cette période.
2013 | 2014 | 2015 | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | Augmentation totale des effectifs entre 2013-2019 | |
Amazon | 117 300 | 154 100 | 230 800 | 341 400 | 566 000 | 647 500 | 800 000 | 582 % |
47 756 | 53 600 | 61 814 | 72 053 | 80 110 | 98 771 | 118 899 | 149 % | |
6 337 | 9 199 | 12 691 | 17 048 | 25 105 | 35 587 | 44 942 | 609 % | |
Apple | 84 400 | 97 000 | 110 000 | 116 000 | 123 000 | 132 000 | 137 000 | 62 % |
Microsoft | 99 000 | 128 000 | 118 000 | 114 000 | 124 000 | 131 000 | 144 000 | 45 % |
Ainsi, on peut constater une corrélation entre cet investissement dans le travail salarié et l’augmentation du taux de profit de ces entreprises. Plus de 580% d’augmentation des effectifs pour Amazon entre 2013 et 2019 et plus de 600% pour Facebook, tandis que Apple et Microsoft n’ont augmenté leurs effectifs que respectivement de 62% et 45%. Il semble dès lors que ce soit les entreprises voyant leur masse salariale augmenter plus vite que leur capital constant qui se trouvent en mesure d’augmenter leur taux de profit.
Il serait possible de ne considérer cette corrélation que comme un simple hasard, sans lien de causalité, si elle ne rentrait pas totalement en cohérence avec les thèses développées par Marx dans le livre III du Capital. Regardons plus en détail l’analyse qu’il nous propose pour savoir si elle s’avère toujours pertinente aujourd’hui.
Qu’est-ce la baisse tendancielle du taux de profit et est-elle toujours d’actualité ?
Ces chiffres, bien que spécifiques et portant sur une courte période, semblent aller dans un sens qui corrobore la thèse de la baisse tendancielle du taux de profit. Expliquée par Marx, cette dynamique interne au fonctionnement du système économique n’a pas été découverte par lui. Elle avait déjà été remarquée par d’autres économistes classiques libéraux comme A. Smith, D. Ricardo ou J.S. Mill, sans que ces derniers n’aient été en mesure d’en donner de justification satisfaisante.
Marx constate que la concurrence pousse nécessairement les entreprises à chercher à augmenter leur productivité pour rester compétitives. Après une première phase de croissance, elles ont ainsi tendance à investir de manière plus importante dans le capital constant (les moyens de production: les machines et les matières premières) que dans le capital variable (la force de travail). Mécaniser la production en multipliant les machines augmente la productivité et baisse le prix final des marchandises produites, donc permet d’en vendre plus que ses concurrents et d’augmenter ses profits. Mais ces derniers finissant par faire de même, cet avantage est rapidement compensé. Le capital constant devient de plus en plus important par rapport au capital variable. On dit que le capital s’alourdit.
Ce processus, intrinsèque au fonctionnement du système économique, s’avère rapidement extrêmement problématique puisque seul le travail humain se trouve être créateur de valeur nouvelle. En effet, la force de travail demeure la seule marchandise permettant l’extraction de plus-value car, par définition, le salaire ne rémunère pas la totalité du travail effectué (pour plus de détail sur ce constat, voir ici : Quelles activité créent de la valeur, valeur et force de travail quelques définitions).
Rajouter des machines au processus de production ne permet que de transférer à une marchandise de la valeur produite dans le passé (auparavant agrégée dans la machine en question). Il n’y a par conséquent pas de création de valeur nouvelle. On se retrouve alors dans une situation où, même si le capital variable est le seul à même de générer de la valeur, l’entreprise se voit, à cause de la concurrence, dans l’obligation d’augmenter en priorité son capital constant. La croissance de l’entreprise permet en général d’augmenter la quantité totale de profits, mais son taux de profit quant à lui diminue. C’est-à-dire qu’investir dans le capital de l’entreprise rapporte un pourcentage moindre qu’auparavant, et ce même si cette même entreprise génère des profits records. Il devient difficile d’accepter pour l’investisseur de continuer à placer son argent dans une entreprise qui ne lui rapporte que 2% par an alors qu’auparavant elle lui en rapportait 10%. Il risque ainsi de s’en détourner et d’investir dans une autre, plus rentable, alourdissant le capital de cette dernière et baissant ainsi mécaniquement son taux de profit.
Dès lors, le système économique se retrouve dans une course contre la montre pour compenser cette baisse, usant de différents stratagèmes dont en premier lieu celui d’augmenter l’exploitation des salariés pour accroitre l’extraction de la plus-value et donc le profit. (Pour une mise en exemple nous vous conseillons de lire Qu’est-ce que la baisse tendancielle du taux de profit ? que nous avions publié il y quelque temps). Ce sont ces stratégies économiques qui en contrebalançant pour un temps la chute du taux de profit lui donnent son caractère « tendanciel », dans le sens où cette chute n’est pas continue et rectiligne. Elle fluctue selon les périodes et les contre-tendances bien qu’elle conserve, sur le long terme, une tendance à la baisse, comme nous le montre le graphique de Michael Roberts.
Dans notre exemple, il est question de « machines », de mécanisation et d’automatisation comme si toutes les entreprises se trouvaient être des usines. Mais il faut bien comprendre que même dans le cas des entreprises du numérique, la production fonctionne de manière similaire. En effet, la mécanisation chez Amazon passe par la robotisation des entrepôts, voire la mise en place d’un service de livraison par drone. Pour Google ou Facebook, l’investissement se fait principalement dans un capital constant immatériel, l’automatisation passant par la création d’intelligences artificielles capables de systématiser certaines tâches ou tout simplement dans l’investissement et la création de logiciels facilitant le travail des programmeurs et améliorant leur productivité. Ce sont des moyens de production qui, aux yeux du système économique, ne sont en rien différents des machines dans un atelier ou une usine.
Si l’augmentation des effectifs est plus faible chez Apple et Microsoft que dans les autres sociétés des GAFAM, ce n’est dû ni au hasard ni à un choix stratégique de la part de ces entreprises. En effet, les sociétés récentes ou présentes sur un nouveau marché ont tendance à plus baser leur production de marchandises sur le travail de leurs salariés que sur les machines avec lesquelles ils travaillent. Elles possèdent beaucoup de travailleurs mais peu de locaux et de moyens de production. En termes marxistes, cela revient à dire que les entreprises présentes dans un nouveau secteur de production ont tendance à produire leurs marchandises avec un capital variable plus élevé par rapport à leur capital constant que les entreprises plus anciennes. En revanche, au fur et à mesure des années d’exploitation et du développement d’autres sociétés concurrentes, ces entreprises vont de plus en plus investir dans les moyens de production, augmentant ainsi leur productivité et mécanisant leur production.
Force de travail et composition organique du capital des GAFAM
Les sociétés récentes comme Facebook, Amazon ou Google s’imposant sur de nouveaux secteurs de production se trouvent encore dans la première phase d’expansion de leur capital. C’est-à-dire que la majorité de leurs investissements est utilisée pour s’étendre aussi bien géographiquement que dans de nouveaux secteurs faiblement concurrentiels. Dès lors, et même si une partie de ces investissements est utilisée pour moderniser la production déjà existante, la plupart se porte principalement sur l’achat de force de travail. Cela n’empêche pas pour autant ces entreprises d’investir également dans la mécanisation de la production et de faire croitre leur capital constant, simplement leur capital variable se voit croitre encore plus rapidement,ce qui s’avère déterminant pour leur taux de profit.
En revanche, dès qu’elles auront atteint la seconde phase d’expansion de leur capital, c’est-à-dire le moment où une majorité des investissements sera consacrée à améliorer la production déjà existante plutôt qu’à conquérir de nouveaux marchés faiblement concurrentiels, là leur taux de profit risque de tendre à la baisse. Microsoft et Apple semblent être dans ce cas. Le cœur de leur activité productive demeure les systèmes d’exploitation (ainsi que les smartphones pour l’entreprise à la pomme) et ce depuis plusieurs décennies. Elles ont ainsi investi au fur et à mesure des années d’exploitations dans la modernisation de leur appareil productif et son automatisation, alourdissant ainsi leur capital. Leurs investissements actuels dans de nouveaux marchés faiblement concurrentiels, par exemple le Cloud pour Microsoft, ne suffisent plus à compenser le poids de ces années d’accumulation de capital constant.
Ce rapport entre capital constant et capital variable est donc déterminant pour le calcul du taux de profit. Marx l’appelle composition organique du Capital (COC). Une composition organique élevée pour une entreprise signifie qu’elle a plus investi son capital dans les machines et dans les infrastructures que dans la force de travail. À l’inverse une COC faible signifie que la majeure partie du capital de cette société est composée de salariés.
Regardons en détail ce que nous montre ce graphique au regard de l’analyse du précédent. On peut constater ici que le capital d’Apple et de Microsoft s’est notablement alourdi depuis 2008. La part de capital constant a augmenté par rapport à celle du capital variable. Il est intéressant de constater que cette hausse est de proportion comparable à la moyenne de la baisse du taux de profit que ces deux entreprises ont subi sur cette même période.
À l’inverse Facebook et Amazon ont largement développé leurs investissements dans la force de travail et leur capital s’est allégé. Le taux de profit de Facebook culmine logiquement en 2018, l’année où la composition organique de son capital est la plus basse. L’année suivante, la composition organique du capital de Facebook augmente et son taux de profit baisse nettement.
Pour Amazon, le taux de profit chute à partir de 2009, même si cette entreprise fait baisser la composition organique de son capital. Dans son cas, c’est le coût lié à l’entretien de son statut de monopole qui a largement contribué à faire baisser son taux de profit. En effet, son cœur d’activité (le e-commerce) étant réalisé dans un secteur plus concurrentiel que celui des autres GAFAM, Amazon a décidé de rogner sur ses profits pour écraser sa concurrence. En tirant les prix de vente de ses produits au plus bas, elle baisse son taux de profit, mais force ses concurrents à faire de même. Ces derniers ne possédant pas la capitalisation boursière d’Amazon lui permettant de survivre à un taux de profit aussi faible, ils finissent par faire faillite ou être rachetés par le géant. Dans un second temps, son statut de monopole consolidé lui permet de fixer les prix qu’elle souhaite et donc de relever son taux de profit. Dans le cas d’Amazon, la société a même été déficitaire durant deux ans, mais son taux de profit est reparti à la hausse à partir de 2014, renforcé par la diversification de ses activités plus rentables que ses ventes directes (Cloud, Marketplace et Amazon Prime principalement). On constate que cette hausse du taux de profit est corrélée avec une composition organique du capital particulièrement basse.
Pour Google, la composition organique de son capital a subi quelques variations, mais reste relativement stable tout comme son taux de profit qui a peu évolué depuis 2008. Les fusions-acquisitions de nouvelles sociétés possédant un capital variable important, semble permettre pour le moment à la firme de Mountain View de compenser le capital constant investi pour moderniser la production de celle qu’elle possède déjà.
Avec la profusion pléthorique de capital fictif, l’enjeu était de savoir si cette contradiction fondamentale du capitalisme qu’est la baisse tendancielle du taux de profit restait de mise. Certains courants marxistes comme la Wertkritik, Temps Critiques ou des économistes comme Michel Husson affirment que ce n’est plus le cas pour différentes raisons. Nos constatations nous permettent de conclure que pour l’ensemble des entreprises observées, le taux de profit semble être largement corrélé à la composition organique de leur capital. Les lois économiques décrites par K. Marx semblent être donc toujours d’actualité.
Bien évidemment nos chiffres limités ne suffisent pas à prouver définitivement que la baisse tendancielle du taux de profit demeure opérante, surtout que cette contradiction interne est à lire dans le profit moyen de toutes entreprises et non dans celui de quelques sociétés parmi les plus importantes du monde. Pourtant ces chiffres constituent tout de même un premier point d’appui utile. Ils tendent à démontrer toute l’importance que conserve le capital variable, c’est-à-dire le travail humain, dans le calcul du taux profit des entreprises à capitalisation boursière importante. Même si ces chiffres ne suffisent pas à prouver irrévocablement le maintien de la baisse tendancielle du taux de profit, ils démontrent que les cadres de fonctionnement économiques produisant cette contradiction semblent toujours à l’œuvre dans le capitalisme actuel et donc la pertinence de continuer à les examiner en détail.
Enfin, notre étude de cas tend à démontrer que l’exploitation du travail salarié demeure au cœur des profits des GAFAM et de leurs activités. Le fait que ces sociétés soient organisées dans le but de capter un maximum de capital fictif ne change rien à ce constat. L’afflux pléthorique de capital monétaire sur les marchés modifie peut-être le comportement de certaines entreprises, mais ne semble pas les libérer de la réalité de la loi de la valeur, ni du fait que seul le travail humain est à même de la produire.
Benjamin Lalbat pour L’Orage.org
Dans le prochain épisode à paraitre le 29 décembre : Les contre-tendances à la baisse du taux de profit au sein du capitalisme inversé, nous rentrerons dans le cœur de notre sujet en abordant en détail les influences contraires mises en place par les entreprises pour contrebalancer cette baisse tendancielle du taux de profit. En effet, posséder une capitalisation boursière importante autorise l’utilisation d’un plus large éventail de possibilité de contre-tendances. Surtout nous verrons quel rôle revêt encore le taux de profit au sein de ce capitalisme inversé centré sur l’attraction de capitaux fictifs.
[1] De son côté, Marx n’intégrait pas le capital fictif au calcul du taux de profit général, néanmoins il affirmait que le faire ne posait pas de problème théorique. « En ce sens que ces capitaux [le capital-actions], bien qu’investis dans de grandes entreprises productives, ne produisent, déduction faite de tous les frais, que des intérêts plus ou moins importants, appelés dividendes. Ils n’entrent donc pas dans l’égalisation du taux de profit général, puisqu’ils fournissent un taux de profit inférieur au taux moyen. S’ils y entraient, ce taux de profit baisserait davantage encore. Du point de vue théorique, ils peuvent être inclus dans le calcul, mais on obtiendrait alors un taux de profit plus faible que celui semble exister et qui est vraiment décisif pour les capitalistes. » Le capital livre III p1585-1586. Nous pensons justement que la généralisation de la société par actions a inversé ce rapport depuis les années 1860 où Marx écrivait ces lignes. Comme nous le soulignions dans le premier article de cette série, c’est aujourd’hui la totalité de la plus-value non-réinvestie dans l’entreprise qui est distribués sous forme de dividendes. La majorité de la rétribution des dirigeants d’entreprises et même de certains encadrants se fait par rapport à leur possession d’actions. Maximilien Rubel, en traduisant le paragraphe de Marx dans son édition française, ajoute d’ailleurs cette remarque personnelle en note de bas de page : « Ces remarques ont considérablement vieilli en l’espace de cent ans ; les dividendes distribués par les grandes sociétés par actions, industrielles, commerciales et financières, constituent, pour leurs fondateurs une masse considérable de profits. » M. Rubel in K Marx livre III p2144.
[…] dans le mécanisme des contre-tendances à la baisse du taux de profit chez les GAFAM Taux de profit et composition organique du capital des GAFAM Tesla et SpaceX : une bulle […]
Bonjour, où peut-on trouver votre article « Qu’est-ce que la baisse tendancielle du taux de profit » ?
Cordialement
HS
Je vous conseil de lire soit le sous-chapitre de cet article qui l’explique, soit pour un exemple plus parlant je vous renvoi à l’article que l’on avait fait il y a quelques années avec le collectif tantquil dont nous avions fait partie. Il est toujours disponible ici : https://tantquil.net/2011/12/15/quest-ce-que-cest-la-baisse-tendancielle-du-taux-de-profit/